22/12/2017

UNE RAISON TIMIDE ABOIE PLUS QU'ELLE NE MORD

1. Stultifera Navis- 2 -  collage sur toile  -60x80cm- 2011.jpg

 

2. titre_manuel xx.GIF

3 bis. Manuel de Diéguez.JPG

 

Une raison timide aboie plus qu'elle ne mord

" On ne peut apprendre la philosophie, on ne peut qu'apprendre à philosopher."
E Kant

 

1 - Nos sciences humaines définitivement énigmatiques
2 - Histoire des échecs de la critique des religions en France
3 - Le retour des mythologies messianiques
4 - La régression contemporaine et les nouvelles idoles

 

1 - Nos sciences humaines définitivement énigmatiques

Deux cent vingt-huit ans après le 14 juillet 1789, le Président de la République n° 5 depuis la dernière en date de nos Constitutions, s'est candidement étonné que des citoyens français éduqués à l'école de la raison dès l'enfance, basculent dans la croisade religieuse, puis dans l'assassinat inspiré par l'esprit apostolique de l'islam, puis dans le fanatisme sacré qui caractérisait le mythe de la délivrance depuis le premier siècle.

Soulevée en ces termes, la question demeure d'une naïveté surprenante. Et pourtant, elle révèle une aporie épistémologique plus stupéfiante encore, puisqu'elle implique que la Renaissance n'a pas fait progresser d'un pouce la connaissance des mythologies fabuleuses dont l'espèce humaine s'enveloppe. Un siècle après la découverte du continent gigantesque de l'inconscient freudien, et cent cinquante-huit ans depuis la publication de L'évolution des espèces (1859) de Darwin, nos classes dirigeantes et toute notre intelligentsia devenue pseudo scientifique n'en savent pas davantage que le XIVe siècle de Pétrarque. Quelle est donc la spécificité de l'aveuglement humain ?

Il semble qu'il ne soit pas difficile de la constater : nous sommes le seul animal à savoir que la terre se déplace dans le ciel. Depuis Copernic et Galilée, nous savons également que c'est nous qui faisons tourner autour du soleil les fausses évidences qui nous frappent de cécité. Nous ne sommes pas encore devenus pleinement conscients des conséquences de ce gigantesque déplacement de la recherche scientifique mondiale, bien qu'elle réponde à la Kritik der reinen Vernunft (Critique de la raison pure) d'Emmanuel Kant publiée en 1781 qui démontrait que nous faisons tourner l'univers autour de nos catégories mentales. Mais, depuis lors, ce sont l'espace et le temps eux-mêmes qui ont changé de « dimension ».

Prendre la mesure de la condition humaine dans un univers devenu entièrement aporétique, rend notre humanisme et toutes nos sciences humaines définitivement énigmatiques. Quand le Président de la République déclare qu'une erreur semble avoir surgi au sein de notre système d'enseignement, sa puérilité épistémologique en dit long sur le refus de l'humanité de scruter au microscope le sens que nous donnons aux verbes savoir et comprendre.

2 - Histoire des échecs de la critique des religions en France

Dans cette perspective, il est indispensable de poser quelques jalons sur le chemin de notre historicité mentale, car nous nous trouvons sur le sentier d'une prise de conscience nouvelle et sans exemple qui nous informera de la nature même des mythes religieux fondés sur une cosmologie fantastique. Ainsi, au XVIe siècle, François 1er et Budé avaient fondé un Collège de France également dénommé Collège des trois langues et destiné à enseigner les langues du sacré occidental - le latin, le grec et l'hébreu. Cependant, depuis lors, la connaissance du grec et du latin n'a cessé de régresser, pour ne rien dire de l'hébreu. Rabelais évoquait encore la chute des hommes dans la philautie, c'est-à-dire dans l'amour de soi-même. Aujourd'hui, nous avons remplacé philautie par le terme banal, imprécis et aseptisé d'égoïsme. La délatinisation et l'oubli du grec ont conduit à un appauvrissement de notre langue, parce que seuls les progrès de notre inculture croient nous faire comprendre de « tout le monde ».

François 1er et Budé avaient tenté de faire venir Érasme à Paris. Mais l'ironique auteur de Stultitiae laus - L'Éloge de la stupidité (et non de la « folie » selon la traduction édulcorante retenue) - savait fort bien que sitôt rémunéré par une cour, le savant en devient fatalement le satellite, donc un agent du temporel. Il avait préféré dresser définitivement sa tente à Bâle, qui s'était divisée entre le demi-canton de Bâle-campagne, demeuré farouchement catholique et de Bâle-ville, devenue protestante, afin de bien souligner que la pensée critique sera toujours citadine et que la pensée religieuse restera campagnarde.

Ces prévisions d'Érasme se sont vérifiées. Bientôt le desserrement du tricot théologique français a conduit à l'Affaire des Placards, qui en ridiculisant la messe plus durement que Calvin, a condamné François 1er et Budé à bloquer le renouvellement et l'approfondissement du christianisme et à revenir à une orthodoxie d'État qui, en fait, déclarait hérétique dans l'oeuf l'élan intellectuel du Collège de France.

En vérité, tout le XVIIe siècle officiel a tenté de retrouver l'astronomie ptolémaïque, anti-copernicienne et anti-cartésienne. Ainsi Bossuet se fondait encore sur la chronologie biblique. Et au XVIIIe siècle, Voltaire lui-même a continué de croire en l'existence d'un horloger suprême qui aurait consacré ses forces à fabriquer un ciel et une terre voués à servir sa propre gloire. Même Candide ou l'optimisme n'a pu ébranler la croyance de l'exilé de Ferney en un créateur plein de sollicitude et attaché à bien régler une horlogerie fantastique.

C'est dire que le XXIe siècle ne pourra laisser les grands États prendre du retard sur les conquêtes modernes de la science anthropologique et astronomique, alors que, de nos jours encore, la connaissance des mythes sacrés dont jouissent la classe dirigeante et l'intelligentsia européenne, n'a pas progressé depuis la Renaissance. Il faudra donc que les grands États participent activement au combat d'une science du psychisme d'avant-garde, afin d'enfanter une humanité aux yeux grands ouverts et qui saura prendre toute sa place dans un combat audacieux : oui ou non, le genre humain a-t-il besoin pour survivre de se doter d'une dose bien calculée d'ignorance et de sottise ou bien se révèlera-t-il capable de se construire une grandeur nouvelle d'apprendre qu'il ne sait rien ?

3 - Le retour des mythologies messianiques

La critique ironique de la sottise est née en 1511 avec le Stultitiae laus, cité plus haut. Il est fort probable que nos sociétés se donneront à nouveau la sottise proprement théologique pour théâtre, puisque les questions religieuses occupent à nouveau la totalité des champs conjugués de la politique et de l'histoire, comme le prouvent les guerres du Moyen-Orient ou le comportement d'Israël et des sionistes chrétiens américains à propos de la ville de Qods-Jérusalem. Mais la critique indirecte de la sottise avait commencé avec la comédie d'Aristophane (vers-445 - vers-380) Les Oiseaux, qui mettait en scène la stupidité des dieux privés de nourriture à la suite de la grève des fournisseurs habituels de viande sur leurs autels.

Mais l'histoire de l'ignorance et de la sottise a connu, depuis une trentaine d'années, un parcours à la fois tumultueux et serpentesque, parce que la distance entre la culture populaire et le savoir qui appartiennent de nos jours à l'intelligentsia et à la classe dirigeante a changé de nature. Pis que cela : ce sont les élites dirigeantes qui se sont révélées plus rêveuses que le peuple autrefois tenu pour crédule et pour coupable d'une candeur enfantine. Aussi a-t-on vu, au XXe siècle, la majorité des intellectuels formés à l'école publique et initiés, semblait-il, à une laïcité pensante, se ruer tête baissée dans une mythologie messianique fondée sur la croyance que l'ensemble du peuple forgerait une élite coulée dans le moule d'une probité naturelle créatrice d'un paradis socialiste sur la terre.

Du coup l'étendue s'est rétrécie entre la puérilité des foules et la psychologie scientifique censée détenue par les « élites ». Quand François Mitterrand a déclaré qu'on « pourrait célébrer une messe à l'occasion de ses obsèques », quand Michel Rocard a insisté sur son désir de se trouver inhumé « selon le rite luthérien », ni l'un, ni l'autre ne disposaient d'une ombre de connaissance anthropologique des enjeux existentiels auxquels ils participaient, c'est-à-dire à la croyance en l'efficacité de la manducation physique ou seulement symbolique de la chair du « Dieu » et de la potion effective de son hémoglobine tels que définis au Concile de Trente en 1545 et confirmé par tous les conciles ultérieurs.

Exemple : que sait aujourd'hui l'anthropologie scientifique du mythe eucharistique ? Ainsi, la théologie chrétienne prétend qu'un Dieu, alors en chair et en os et qui avait des cuisses et des fesses, comme le rappelait encore le Cardinal Daniélou (1905-1974), avait fait assassiner son propre fils et se l'était fait apporter encore tout pantelant, afin de se faire payer un tribut de chair et de sang suffisamment précieux pour lui permettre, en retour, de pardonner à sa créature un « péché originel » qu'il jugeait insultant. Eve aurait fait tomber son époux dans le crime de désobéissance le plus impardonnable, celui de l'initier à la science du vrai et du faux, du Bien et du Mal, du savoir et de l'ignorance. Depuis lors, la mort de la victime christique met en scène de manière détaillée les tortures dont la victime de l'autel était censée payer le prix. (Voir, Lepin, L'idée du sacrifice de la Messe d'après les théologiens depuis l'origine Jusqu'à nos jours, Paris, 1926, pp. 3-182). Tel est l'abîme de l'alliance de l'ignorance avec la barbarie et de la sauvagerie avec la sottise, dont la loi du 9 décembre 1905 avait tenté de libérer le genre humain.

4 - La régression contemporaine et les nouvelles idoles

Mais comment la laïcité d'aujourd'hui oserait-elle enseigner, ou même simplement rappeler, à l'heure où des milliers de fans de Johnny Hallyday ont assisté à la célébration d'une messe à la Madeleine, le Président de la République en tête, que se jouait sous leurs yeux la théâtralisation de l'égorgement d'un homme à la place du mouton qu'un Abraham mythique était censé avoir sacrifié à la divinité sadique, propre à un lieu particulier, il y a plusieurs millénaires, afin d'épargner son fils unique, Isaac. Pas un seul des « amis de Johnny » qui sache que, de l'aveu de tous les théologiens chrétiens, Jésus n'est autre que « l'Isaac d'Abraham », l'Isaac retrouvé et égorgé à la place du mouton substitutif susdit. Cette régression anté-abrahamique est au cœur de la mythologie de la messe.

Mais la laïcité actuelle est-elle en mesure d'entendre ce récit ? Toutes les religions sacrificielles de notre temps se prêtent à ce type de démythologisation. Ainsi, le Mahomet (accessible en PDF) de l'historien spécialiste des langues et des civilisations orientales, Maxime Rodinson (1815-2004), met clairement en évidence les conditions politiques, économiques et mythologiques de l'émergence de l'islam dans la péninsule arabique.

La philosophie et l'anthropologie critique ne perdront plus leur temps à réfuter ni les dieux ripailleurs sur l'Olympe, ni les trois dieux uniques spécialisés dans leur gestion commune d'un imaginaire jardin des supplices sous la terre. On se demandera exclusivement ce que la croyance en leur existence dans le cosmos « voulait dire » ou tentait d'exprimer. L'heure de l'examen de la finitude des dieux uniques a commencé : ce ne sont plus les dieux qui disposent de la balance à peser le genre humain, c'est le genre humain qui construit la balance à peser ses dieux.

Le 22 décembre 2017

Source : http://aline.dedieguez.pagesperso-orange.fr/tstmagic/1024/tstmagic/laicite/raison_timide.htm

 

2. index 2 xx.GIF

 

D’où vient l’échec de la critique des religions (et pas qu’en France) ?

Modeste grain de sel de Théroigne

 

Du fait évident que le besoin de dieux relève de l’affect, pas de l’intellect, et que l’affect humain, depuis que les pères ont raflé le pouvoir aux mères, non seulement ne s’est pas affranchi de l’infantilisme où le super-pouvoir des « mammas » avait plongé le mâles, mais s’est étendu à tous, mères comprises, et même aggravé, puisque la volonté de puissance est une pulsion infantile, à laquelle, seule, la toute petite enfance a le droit de s’abandonner.

Pourtant, la France de la Renaissance avait fait un réel effort, compte tenu du fait que la maturité ne peut s’inculquer, s’enjoindre ni s’enseigner, puisque tout ce que peuvent se permettre les matures à l’égard des immatures, c’est prêcher d’exemple et tenter de créer les conditions favorables à la maturation. Même la démarche héroïque de Freud n’y a pu rien de plus.

Manuel de Diéguez cite avec raison Budé et François Ier et leur création du Collège des trois langues. On peut se permettre de rappeler qu’il y eut aussi, sur un plan individuel, Rabelais, le premier à ma connaissance qui ait réussi à démontrer que l’affranchissement du joug religieux passe par la connaissance aussi vaste et profonde que possible de toutes les religions existantes ou, du moins, connues.

Pourquoi ? Parce que l’étude et la comparaison des religions entre elles amène irrésistiblement à s’interroger sur ce qui a poussé les hommes à s’inventer des dieux. Une fois obtenue la réponse à cette question, le curieux est plus qu’à moitié sorti d’enfance, et de l’illusion qu’il y a derrière la porte quelqu’un de plus beau, de plus grand, de plus fort et d’absolument miséricordieux, qui s’intéresse à nos petits destins de cirons et va user de sa toute-puissance pour empêcher les méchants de nous enfoncer sous les ongles des aiguilles rougies au feu.

Rabelais a tout su des religions connues de son temps, tout su des gloses des savants, tout su des superstitions populaires qui n’en diffèrent que par l’apparence. Verbo solo. Et humour. C’est que la connaissance intime des pulsions les plus secrètes du « bipède sans plumes » n’éveille chez tout être bien né que la compassion d’une fraternité chaleureuse, à des années-lumière du prosélytisme et, presque toujours, du fanatisme, affligeant quasi immanquablement les âmes religieuses, y compris les païennes.

Je me permettrai aussi de rappeler qu’à ma seule très fragmentaire connaissance, de réels efforts ont été faits, au XXe siècle, en Europe, par d’autres intrépides individus. Et ce n’est pas leur faute si on ne les lit pas pour ce qu’ils sont ou si, les lisant, on refuse de les comprendre.

N’en citons que deux ou trois, pour ne pas allonger la sauce, mais il y en a sûrement eu d’autres. On peut toujours essayer de les découvrir.

Laissons de côté la démarche héroïque, purement médicale, de Freud, ses accomplissements et ses erreurs.

Celui à qui on doit l’effort de connaissance la plus vaste et la plus approfondie dans ce domaine est sans conteste Robert Graves, avec sa somme, qui est surtout une clé :

 

4. WHITE GODDESS.jpg

 

 

Robert GRAVES

The White Goddess

Londres, Faber & Faber, 1948

Langue : anglais

 

 

 

 

Laquelle ne rencontra qu’incompréhension jusqu’en 1960, où les adeptes du « flower power » commencèrent à s’intéresser à lui.

L’ouvrage parut pour la première fois en français à Monaco.

 

0. Déesse blanche Monaco.jpg

 

 

 

Robert GRAVES

La Déesse blanche

Monaco, Éditions du Rocher, 1979

584 pages

 

 

 

Depuis, scandaleusement ré-intitulé « Les mythes celtes » par une édition analphabète ou commerçante à courte vue, alors qu’il concerne précisément la mythologie en général et non pas la mythologie celtique en particulier. Alors qu’il s’agit du schéma immuable, unique, sur lequel se fonde tout mythe et que la déesse en question n’est autre que la lune, qui luit pour tous et pas seulement pour les Celtes. Alors que « la triple déesse » est infiniment plus vieille que le spermatozoïde qui a fabriqué le premier ancêtre moyen-oriental préhistorique des Celtes. Alors qu’il y est question de comprendre la naissance du religieux, il y a plus de 110.000 ans.

 

 6.  Mythes celtes.jpg

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Graves a poursuivi cette exploration-élucidation dans le reste de son œuvre, y compris romancée, mais surtout dans :

 

 7.  Mythes Grecs Fayard-1.jpg

Robert GRAVES

Les mythes grecs

Fayard

666 pages

Idem - Seuil, Pluriel - 880 pages

Idem - Le livre de poche - 1185 pages

 

 

 

8. Mythes Hébreux.jpg

 

 

 

Robert GRAVES et Raphaël PATAI

Les Mythes hébreux

Fayard, 1987

300 pages GF

 

 

 

2. index 2 xx.GIF

 

J’ai déjà parlé ailleurs  d’un des pionniers dans ce domaine : Salomon Reinach, dont les travaux ont, avec ceux de Sir James George Frazer et quelques autres, précédé de peu ceux de Graves

 

9. Rdeinach 1.JPG

 

 

Salomon REINACH

Cultes, mythes et religions

Paris, Robert Laffont, 1996, 2000, etc.

Collection « Bouquins », 1350 pages

 

 

 

Note de l’éditeur :

« Il n'y a d'intéressant sur la terre que les religions », notait Baudelaire dans ses journaux intimes. Salomon Reinach (1858-1932) fut de son avis, puisqu'il consacra sa vie entière à l'étude des cultes, des mythes, des croyances, des superstitions. De l'Antiquité gréco-latine à la Gaule gallo-romaine, rien n'échappait à sa curiosité. Et si les frères Goncourt, avec leurs manies de « bibeloteurs » furent à l'origine du musée Carnavalet, Salomon Reinach fut l'un des promoteurs du musée des Antiquités nationales de Saint-Germain-en-Laye, le musée qui nous renseigne le mieux sur nos origines lointaines, sur nos sources païennes et sur le début du christianisme en France. Salomon Reinach n'étudie pas seulement la manière dont ont été domestiqués nos animaux, il s'intéresse également aux coutumes de mariage de nos ancêtres, au totémisme druidique et à Vercingétorix, à la figure d'Orphée et aux vestales romaines, aux cathares et à Gilles de Rais, à Jeanne d'Arc et à l'Inquisition. Tous les aspects de la vie religieuse le fascinent. Durant des années, il a donné, à des revues plus ou moins savantes, des études extrêmement précises sur des points qui paraissent de détail mais qui sont révélateurs des grands problèmes fondamentaux.

 

10. Reinach 2-1.JPG

 

 

 

Salomon REINACH

ORPHEUS, Histoire générale des religions

Paris, L’Harmattan, 2002

Collection « Les introuvables », 628 pages

 

 

 

Note de l’éditeur :

Pourtant résultat d'une commande ministérielle, Orpheus (1909) devait être refusé par l'Éducation Nationale, considérant que la présentation des religions comme un phénomène naturel allait à l'encontre de la morale commune. Sigmund Freud dans Totem et tabou se réfère constamment à cette œuvre. Orpheus ne cesse d'entretenir la curiosité, peut-être moins dans l'idée d'une exactitude historique que dans une perspective anthropologique.

 

2. index 2 xx.GIF

 

Il ne faudrait pas oublier non plus le grand contemporain, qui, en renouant avec la manière pédagogique de Rabelais, semble vouloir à lui seul racheter presque tout l’infantilisme US, ce qui n’est pas peu dire.

 

11. Jambes fluettes, etc..png

 

 

Tom ROBBINS

Jambes fluettes, etc.

Gallmeister, 2014

544 pages

 

 

12. Parfum jitterbug.jpg

 

 

Tom ROBBINS

Un parfum de jitterbug

Gallmeister, 2015

512 pages

 

 

En attendant le merveilleux Tibetan Peach Pie. A Live Account of an Imaginative Life, scandaleusement différé par les éditions Gallmeister depuis 2014.

 

2. index 2 xx.GIF

 

P.S. : C’est M. Malaparte qui remplace, dans ses écrits, la « fraternité » de la trinité française – non moins sainte et indissociable que l’Autre – par « etc. », en même temps qu’il donne un avis original quoique sujet à vérification sur l’avenir du christianisme en Europe. (Journal d’un étranger à Paris, La Table Ronde, 1947). L’histoire tranchera.

 

2. index 2 xx.GIF

    

La ferme volonté de créer la paix est une grande force

Jean-Paul VuilleumierArrêt sur Info17 décembre 2017

 

13. livre-ganser-667x1024.jpg

 

Interview de Daniele Ganser, historien et irénologue suisse

Propos recueillis par Jean-Paul Vuilleumier

Zeit Fragen – N° 31, 11 décembre 2017

Fin 2016, est parue en allemand la 1re édition du livre «Les guerres illégales de l’OTAN. Une chronique de Cuba à la Syrie.» de Daniele Ganser, historien suisse et spécialiste des sciences de la paix. Entretemps, cet ouvrage en est à sa 7e édition avec plus de 50 000 exemplaires vendus. A l’occasion de la parution toute récente de l’édition française de ce bestseller, Horizons et débats s’est entretenu avec l’auteur sur quelques aspects de ses analyses concernant la guerre et la paix, l’ONU, le Conseil de sécurité et les médias.

Horizons et débats : M. Ganser, vous êtes un historien, spécialiste de l’Histoire contemporaine depuis 1945 et expert en politique internationale. Au sein de l’Institut SIPER que vous avez créé et que vous dirigez, vous vous intéressez à de très nombreux sujets comme l’énergie et la géostratégie, les conflits pour les ressources et la politique économique, les mises en œuvre de guerres secrètes. Vous vous engagez pour la paix. Vous êtes irénologue (spécialiste des sciences de la paix). Votre livre «Les Guerres illégales de l’OTAN» vient de paraître en français. Est-ce que toutes les guerres sont illégales?

Daniele GanserOui, de manière générale, toutes les guerres sont illégales. La Charte de l’ONU, signée en 1945, énonce explicitement que les Etats doivent résoudre leurs différends sans avoir recours à la violence ou aux armes. Les guerres sont donc clairement illégales. Il existe toutefois deux exceptions à cette règle: premièrement, la légitime défense; si un pays est agressé, il a le droit de se défendre militairement. Deuxièmement, une guerre est légale si le Conseil de Sécurité de l’ONU a voté un mandat explicite en ce sens.

L’exemple de la débâcle soviétique en Afghanistan aurait dû faire réfléchir les Etats-Unis en 2001; le fiasco de la soi-disant «exportation de la démocratie» en Irak aurait dû faire réfléchir à deux fois les Français et les Britanniques avant qu’ils n’interviennent en Libye en 2011, ou n’aident les djihadistes en Syrie. N’est-ce pas possible d’apprendre de l’Histoire?

Moi, je pense que c’est tout à fait possible. La leçon la plus importante est que nous ne pouvons pas résoudre nos problèmes par la violence. Cela a été essayé à de nombreuses reprises. Mais cela ne fait qu’ajouter des problèmes. C’est pourquoi, dans mon livre, je souligne l’importance d’adhérer aux principes fondateurs de l’ONU, ne pas bombarder ou envahir d’autres pays, ne pas armer en secret des groupes à l’étranger dans le but de renverser un gouvernement. Nous sommes bien sûr confrontés à de grands défis, mais la violence n’aidera en rien à leur résolution.

Lire la suite…

Source : http://arretsurinfo.ch/la-ferme-volonte-de-creer-la-paix-...

 

 

2. index 2 xx.GIF

 

Et, comme on est très loin d’être sortis de l’auberge…

60 millions de pleurnichards, et moi, et moi, et moi…

La France n'est ni l'Alabama, ni l'Afghanistan

Nicolas Gardères – Causeur 13 décembre 2017

 

14. Pleurnichards.jpg

Hommage populaire à Johnny Hallyday, Paris, décembre 2017

 

Quoi qu’en dise le chœur des pleureuses de tous bords, notre pays n’est ni l’Alabama, ni l’Afghanistan, ni le Zimbabwe. Geindre à l’idée d’être discriminé, grand-remplacé ou simplement perdu dans ce monde absurde : tel est le sanglot de l’homme blanc de peur.

Si les idéologies ne sont certainement pas aussi finies que cela fût massivement dit à la fin du XXème siècle, l’intelligibilité du Monde et de l’Histoire s’est tout de même bien fait forniquer sa race et sa classe, depuis le délitement du moment d’hégémonisme occidental et la Noël 91 à Moscou.

Perdu dans un monde maniaco-dépressif

Sartre était finalement bien un chien bâté et Aron un laquais faible. Sans projet, sans ennemi digne de ce nom (pas de sarrasins, pas de rosbifs, pas de boches, pas de rouges, rien que quelques pieds nickelés méchants) et surtout assommé par un monde moins multipolaire que maniaco-dépressif – en sus mal expliqué par des experts nuls – ce con de Français est perdu.

Il est perdu, comme un enfant perdu dans un hypermarché où 300 pays plein d’étrangers ont remplacé 300 fromages très français. Alors il pleurniche, il geint, sans même la moindre conscience de sa névrose infantile, ce petit con.

Il n’est d’ailleurs jamais aussi content de lui que quand il peut pleurer à chaudes larmes, qui (salauds de riches !) pour Jean d’Ormesson ? Qui (salauds de pauvres !) pour Johnny Hallyday ? Il y aurait une anthropologie culturelle à réactualiser, une actualité des logiques lacrymales à écrire, tant la glorification des gens-qui-pleurent exhibés partout, dit quelque chose de notre état collectif. Marcel Mauss saurait faire cela, mais bon il est mort sous Georges Bidault et Staline, à une époque où cela valait encore la peine d’analyser phénomènes et signes.

Les méchants sont méchants

Le reste du temps, toute morve ravalée, il geint. Il geint de veulerie, comprenant fugacement que dans cette société faussement fluide, sa grande capacité d’action superficielle est inversement proportionnelle à l’idée même de transformations profondes.

Alors il geint. Il geint d’être discriminé, en faisant croire qu’il vit dans le monde de Frantz Fanon et Maya Angelou. Il geint d’être discriminé en Olympe de Gouges sur l’échafaud. Il geint d’être grand-remplacé, fermier blanc Zimbabwéen. Il geint parce que les méchants sont méchants et que personne n’aime les juifs. Du PIR au CRIF et d’OLF au FN, la grande farandole des pleureur.ses. Ouin ouin ouin je n’ai pas d’idée, pas de projet, mais regardez comme je pleurniche bien et surtout mieux que les autres. Le concours de celui qui a la plus grosse larme. Même pas des larmes de rites funéraires antiques, mais de bonnes grosses larmes bien sincères. Or, c’est là qu’est précisément le problème. La victimisation de tous par tous tout le temps n’est plus vécue principalement comme une technique, un vice, une anecdote du combat politique. Elle est devenue le combat politique. Le « je suis extrêmement choqué » de l’improbable Copé est devenu la norme du débat public, le cadre ridiculement étroit dans lequel s’enferre la parole. Il suffit de perdre un peu son temps sur internet, d’y lire les commentaires partout, pour ne voir que des pistolets braqués sur des tempes nimbant des yeux rougis.

Les dominants pleurnichent aussi !

On reproche depuis longtemps à la gauche, qu’elle soit « morale » ou même « olfactive » (tout ce qui n’est pas la gauche est nauséabond), d’utiliser cette technique, dans un but de disqualification de l’adversaire. Peu importe, tant que cela n’était qu’une technique, un artifice bien compris de la rhétorique politicienne et journalistique. Cependant, comme toujours avec les artefacts puissants (Dieu, l’Etat, la Famille…), l’on finit par oublier leur caractère construit. Eh voilà donc une belle démocratie lacrymale où les dominants pleurnichent eux-aussi toutes leurs glandes : patrons geignards, bourgeois craintifs, bobos flippés, politiques extrêmement choqués ! Même les intellectuels de plateaux n’analysent plus grand chose, inaudibles entre deux sanglots, entre deux délations tristes ou invectives au ras des chrysanthèmes… La conséquence morbide de cette démocratie lacrymale est que toutes les causes finissent par s’y valoir, nivelées par les larmes. Il n’y a plus de racisme, plus d’oppression, plus de discrimination, juste des dominants qui pleurent et des dominés qui pleurent… juste des gens qui pleurent… juste des pleurs… juste de la flotte salée dégueulasse !

Je finirai, intimement, ce billet inutile et gratuit, en convoquant Freud et Lacan : « Maman ! Regarde maman ! Regarde comme j’ai bien geint ! »

Source :  https://www.causeur.fr/antiracisme-racisme-antisemitisme-...   



2. index 2 xx.GIF

 

Mis en ligne le 22 décembre 2017

 

 

 

17:18 Écrit par Theroigne dans Actualité, Général, Loisirs, Web | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook |

Les commentaires sont fermés.